Le communiqué est téléchargeable ici en format PDF
Liste des cosignataires
Dans l’ordre d’arrivée des signatures :
Ouest Trans, Iskis – Centre LGBT+ de Rennes, Planning Familial 35, Ædelphes Rennes, TRANSGRRRLS, Equinoxe – Centre LGBTI Nancy, RITA Grenoble, Association FRISSE (Lyon), Pour une M.E.U.F. (Médecine Engagée Unie et Féministe) – association de professionnel·le·s de santé féministes, Association Marsha (Sainte-Etienne), Espace Santé Trans (Paris), Fédération LGBTI, Centre LGBTI de Normandie, La Case de Santé (Toulouse), Lodoti (Local de Documentation Trans et Intersexe), Chrysalide (Lyon), C’est Pas Mon Genre (Lille), Act Up Sud Ouest, Planning Familial 38
En complément de ce communiqué, vous pouvez aider la gynécologue concernée en participant à une cagnotte couvrant ses frais d’avocat :
Communiqué
Début 2019, une professionnelle de santé pratiquant auprès de personnes transgenres a reçu une plainte de la part du Conseil National de l’Ordre des Médecins (CNOM) suite au signalement de proches d’une patiente majeure. Leur grief ? Que la patiente fasse l’objet d’une prise en charge hormonale. La gynécologue attaquée travaille en lien avec notre association, le Réseau de Santé Trans (ReST), qui allie personnes trans et professionnel·le·s de santé dans le but d’améliorer la prise en charge médicale de cette population.
La plainte a dans un premier temps été renvoyée auprès du Conseil Départemental de l’Ordre des Médecins, où la soignante a été convoquée pour justifier de sa pratique. Elle a reçu un rapport confirmant que la plainte n’avait pas de fondement légal. Cependant, le CNOM a choisi de ne pas en tenir compte et a maintenu sa plainte.
Il est reproché à la gynécologue trois choses :
- elle ne respecterait pas son « serment de gynécologue » qui l’obligerait à ne recevoir que des femmes ;
- les traitements hormonaux devraient être prescrits par des endocrinologues ;
- elle ne respecterait pas les recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS) de 2009, et les recommandations de 2015 concernant les équipes et praticiens affiliées à la Société Française d’Études et de prise en Charge de la Transidentité (SOFECT).
Or, l’ensemble de ces accusations sont infondées.
Premièrement, il lui est reproché de «renier son serment» en prenant en consultation des hommes. Hors, c’est de femmes trans dont il est question ici. En niant l’identité de genre vécue par les patientes, la plainte se construit autour d’un propos transphobe et a clairement une fonction discriminatoire. Par ailleurs, les gynécologues reçoivent en consultation des hommes cisgenres, et cela n’a jamais mené à des plaintes.
Deuxièmement, la prescription d’hormonothérapie n’est pas réservée d’un point de vue médico-légal aux endocrinologues (selon les informations disponibles sur le dictionnaire médical de référence, le Vidal).
Troisièmement, l’absence de suivi pluridisciplinaire ne peut pas être imputée. Cela va à l’encontre du droit pour chaque usager d’avoir le libre choix de ses praticien·ne·s de santé, ce qui est garanti par le Code de Santé Publique.
La patiente n’est pas à l’origine de la plainte, et il est indéniable que la procédure va à l’encontre de ses intérêts. Cette dernière ne concerne finalement plus tant la professionnelle de santé ou la patiente, mais bien la pratique d’initiation de traitements hormonaux en général.
L’attaque d’une gynécologue à l’écoute de ses patient·e·s, et mobilisée pour l’application dans les faits de leurs droits humains démontre une volonté des hautes instances de santé de compliquer et psychiatriser les parcours des personnes transgenres.
Vers une prise en charge respectueuse garantie
Les recommandations sur lesquelles se développent les accusations précédentes sont celles de la SOFECT, association médicale autodéclarée experte de la prise en charge des personnes trans. Leurs pratiques dangereuses sont dénoncées depuis des années par les associations. Pourquoi les personnes transgenres devraient-elles obligatoirement consulter des équipes médicales maltraitantes ? En tant qu’usager·e·s du système de santé français, nous devrions pouvoir choisir nos médecins comme le Code de Santé Publique nous le garantit.
Nous revendiquons un libre choix de nos parcours de soin.
Après la sortie de la transidentité du DSM-V en 2010 (ouvrage de référence en psychiatrie), un suivi pluridisciplinaire impliquant une psychiatrisation forcée des personnes transgenres ne peut plus être exigé. Ce type de suivi engendre des délais de prise en charge très longs. Les patient·e·s sont alors exposé·e·s à une grave détérioration de leur santé mentale, à des coming out imposés par les soignant·e·s, et souvent à des psychiatres maltraitant·e·s.
Nous revendiquons une dépathologisation de la transidentité dans les faits.
Il ne peut y avoir d’instance évaluant la “crédibilité” masculine ou féminine d’une personne. Les critères de jugements sont forcément basés sur des valeurs morales ou des stéréotypes de genre. Seules les personnes elles-même sont en mesure de définir leur identité de genre.
Nous revendiquons le respect de l’autodétermination des individus.
En somme, l’accès aux soins des personnes transgenres reste un enjeu majeur : délais long, pathologisatisation de la transidentité, déni du libre choix de ses praticien·ne·s de santé, difficultés d’accès aux traitements hormonaux… Tout ça reste malheureusement une réalité.
Nous revendiquons un accès aux soins respectueux garanti, pour les personnes souhaitant effectuer une transition de genre sur le plan médical comme pour les consultations non liées à la transidentité.
Au-delà de contrevenir aux droits des personnes trans, le CNOM adresse via cette plainte un message de menace à l’ensemble des médecins prescripteurs. Il souhaite que chaque médecin qui accueille et accompagne respectueusement des personnes transgenres sache qu’il encourt une interdiction d’exercer.
Nous ne pouvons que déplorer la discréditation des professionnel·le·s de santé engagé·e·s auprès des personnes transgenres. Elle entraîne dans son sillage une méconnaissance des réalités sociales, nuisant ainsi gravement à l’accès aux soins de tous et toutes.
Contact presse
Élian Barcelo,
Secrétaire du ReST
07 82 18 42 74